La déclaration de l’état d’urgence au Maroc le 20 Mars 2020 à la suite de la propagation du Corona Virus à l’échelle nationale a eu un effet particulièrement retentissant sur les couches sociales précarisées et marginalisées. Les exigences sanitaires liées à la maladie de la Covid 19 et les mesures préventives inévitables à la propagation du virus ont exercé le plus lourd de leur impact sur la communauté migrante installée au Maroc comme sur les migrants qui y sont bloqués et espèrent un jour transiter vers les côtes européennes. Vivant pour une grande majorité au jour le jour, la plupart de ces migrants ont été soudainement coupés des réseaux traditionnels de solidarité et d’assistance et ont vu leurs revenus journaliers fondre à cause des nouvelles règles d’occupation de l’espace public et de l’arrêt brutal de leurs activités.

C’est le cas d’Ange, jeune femme camerounaise célibataire vivant à Salé, ville limitrophe de la Capitale du pays, Rabat. « Excusez-moi je suis un peu émue… » dit-elle d’une voix éraillée quand on lui demande de partager ses conditions de vie dans le contexte de l’urgence sanitaire et tout spécialement pendant la longue période de confinement. Ange a quitté son pays natal, le Cameroun, pour aller dans un premier temps en Guinée Equatoriale puis au Bénin, ensuite au Niger pour traverser vers l’Algérie avant d’arriver au Maroc, éreintée, en 2017. Son parcours a été long et cruellement éprouvant : « J’étais entre la vie et la mort… mon seul espoir tout au long de ma route était d’en sortir vivante ». Ange a perdu les proches qui empruntaient avec elle ce chemin risqué et hasardeux. Son désespoir de ne plus voir les siens restés au Pays hantait ses nuits. « Beaucoup de mes proches qui voyageaient avec moi sont morts au cours de ce voyage. Ils n’ont pas pu tenir face aux difficultés que nous avons rencontré. », confie-t-elle amèrement, avant de continuer d’un air consterné et avec un regard hagard : « Ils étaient fatigués... ils n’ont pas pu tenir face à la famine et la soif. Ceux d’entre eux qui souffraient de maladies sont morts par manque de soins…»

Puis Ange marque un court silence, souffle fort avant de continuer : « Par la grâce de Dieu je suis ici aujourd’hui !» Manière de nous rappeler la résilience et la solidité dont font preuve les migrants les plus vulnérables malgré tous les défis auxquels ils peuvent faire face.

Depuis un an, Ange est bénéficiaire des prestations délivrées par l’Association de lutte contre le SIDA (ALCS), partenaire de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), dans le cadre du projet Favoriser la santé et la protection des migrants vulnérables transitant par le Maroc, la Tunisie, la Libye, l’Egypte et le Yémen

« Quand l’urgence sanitaire de la COVID19 a été déclaré au Maroc j’ai eu peur pour ma santé. Comme tout le monde, je n’avais jamais encore vécu une crise pareille. » Sous le poids d’une plus grande charge physique et mentale due à son extrême vulnérabilité et à sa solitude, Ange s’est inquiétée davantage quand elle a su pour les mesures de confinement et de couvre-feu, depuis le 7 avril, à partir de 18H déclaré à l’échelle nationale : « Je me disais toute seule comment je vais faire ! » Elle continue : « Quelques jours après, j’ai reçu un appel de l’ALCS. J’ai ressenti un tel soulagement quand j’ai reçu, juste au début du confinement, mon premier panier alimentaire. À domicile, en plus ! Je n’avais même pas à me déplacer ni à fournir d’efforts. Il y avait dans le panier des gels antiseptiques, des désinfectants et de la Javel. J’étais tellement soulagée de savoir que l’association ne nous a pas oubliés, spécialement pendant cette période où ce virus menace le monde ».

En plus de la distribution des kits alimentaires, les associations partenaires du projet Favoriser la santé et la protection des migrants vulnérables transitant par le Maroc, la Tunisie, la Libye, l’Egypte et le Yémen assure au Maroc l’assistance psychosociale et médicale à travers la sensibilisation sur les directives sanitaires disséminées par le Ministère de la Santé.

À ce sujet, Ange explique : « L’ALCS m’a sensibilisé sur les gestes barrières, le lavage des mains et la désinfection des lieux de vie. En voyant en plus le panier alimentaire entre les mains, j’ai compris que je n’étais pas seule et ma détresse mentale a diminué. Ça m’a remonté le moral et m’a permis d’être un peu plus rassurée pour ma santé. Ça m’a vraiment marquée et c’est pour ça que j’en parle ».

Du 1 janvier au 31 Mars 2020, malgré tous les défis rencontrés pour la mise en œuvre des activités d’assistance dans le contexte pandémique et de confinement, l’OIM a assisté près de 5087 migrant-e-s au Maroc dans les principales régions d’accueil des migrants à l’échelle nationale à travers ce projet ayant pour objectif la promotion de la santé et du bien-être parmi les migrants.

Face à la détresse des migrant-e-s et pour répondre en urgence à la vulnérabilité des migrant-e-s, l’OIM Maroc s’est mobilisée avec l’ensemble de ses partenaires de la société civile active marocaine et ses partenaires institutionnels, en coordination avec les autorités nationales et locales et en défiant les contraintes du terrain, pour assister plus de 10 708 personnes du 1er avril au 14 juin 2020 dont 3,235 femmes et 1,431enfants non accompagnés et séparés.

« Je prie Dieu fort pour qu’il vous donne la possibilité de venir en aide à tous les migrants qui se trouvent au Maroc. Que Dieu vous soutienne dans votre initiative. » (Ange).

 

*Le prénom de la migrante est fictif pour des questions de confidentialité.

SDG 3 - BONNE SANTÉ ET BIEN-ÊTRE
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