Dans son petit village de Côte d'Ivoire, Alice s'occupait de ses frères et sœurs plus jeunes tout en rêvant de devenir cheffe pâtissière. Tout en s'essayant à la pâtisserie, elle a envisagé la possibilité de poursuivre ses études dans son pays mais ses conditions de vie rendaient cela difficile. Un jour, sa voisine, de retour en Côte d’Ivoire pour les vacances, a dit à Alice que le Maroc était un endroit idéal pour étudier et travailler dans le domaine de la pâtisserie. Elle a aussi promis d'aider Alice à s'y rendre et à poursuivre ses études.
Alice a été séduite par cette proposition et a commencé à économiser de l'argent pour acheter son billet d'avion. Elle se souvient encore avec émotion du moment où elle a pris sa décision : "Quand j'ai décidé d'aller au Maroc, j'avais tellement d'espoir et de rêves ! Je voulais apprendre, grandir et peut-être un jour ouvrir ma propre pâtisserie."
Pendant toute la période où elles étaient en contact par téléphone, sa voisine l'a soutenue et s’est montrée très gentille à son égard. Elle lui a même promis de l'héberger jusqu'à ce qu'elle trouve un endroit convenable où loger. Cependant, une fois arrivée à Casablanca, sa voisine lui a interdit de travailler dans le domaine de la pâtisserie et l'a forcée à travailler chez elle sans salaire : "La princesse est devenue une servante, une esclave" dit-elle avec tristesse.
La réalité s'est avérée beaucoup plus difficile que ce qu'elle avait imaginé. Elle a dû affronter des conditions de travail extrêmement précaires, sans contrat ni salaire : "J'ai tellement travaillé... mais je n'ai jamais reçu de compensation équitable. C'était comme si mon travail ne valait rien" confie-t-elle avec un mélange de tristesse et de colère.
 

La princesse est devenue une servante, une esclave....J'ai tellement travaillé...mais je n'ai jamais reçu de compensation équitable. C'était comme si mon travail ne valait rien

Un soir, après une dispute avec son employeur à propos de son mauvais traitement, de ses mensonges et de ses abus, Alice s'est retrouvée dans la rue sans argent ni endroit où aller : "C'était comme si le monde s'effondrait autour de moi. Je me sentais perdue, sans espoir" ajoute-t-elle les larmes aux yeux.
Dans le silence de la nuit, Alice s'est retrouvée devant la porte close de la maison. Assise sur le trottoir froid, un mélange de peur, de colère et de tristesse l'a submergée. La réalité cruelle de sa situation l'avait frappée, la laissant vulnérable dans la nuit, confrontée à l'incertitude de ce qui allait suivre.
Dans sa détresse, Alice a croisé la route de personnes sans scrupules prêtes à profiter de sa vulnérabilité. Certains individus ont tenté de l'agresser sexuellement. Heureusement, certains parmi les agresseurs ont refusé de participer au viol et sont intervenus pour la protéger : "J'ai réalisé à ce moment-là que je devais me battre pour survivre... pour retrouver ma dignité" dit-elle avec détermination.
Après cette expérience traumatisante et plusieurs tentatives pour se relever, Alice a finalement été orientée vers une association dédiée à l'assistance aux victimes de la traite des êtres humains dans la région de Souss-Massa : "Quand j'ai trouvé l'association, j'ai eu l'impression d'avoir une chance de reprendre le contrôle de ma vie. Ils m'ont tendu la main quand j'étais au plus bas" se rappelle-t-elle.

Grâce au soutien de cette association, partenaire de l'OIM au Maroc depuis 2022, Alice a pu bénéficier d'un hébergement d'urgence, d'un soutien psychosocial et d'une assistance pour commencer un programme de formation en pâtisserie. ©Imane Haffar/OIM

Quand j'ai trouvé l'association, j'ai eu l'impression d'avoir une chance de reprendre le contrôle de ma vie. Ils m'ont tendu la main quand j'étais au plus bas. Ils m'ont donné tellement plus que de la nourriture et un abri. Ils m'ont donné de l'espoir!

Grâce au soutien de cette association, partenaire de l'OIM au Maroc depuis 2022, Alice a pu bénéficier d'un hébergement d'urgence, d'un soutien psychosocial et d'une assistance pour commencer un programme de formation en pâtisserie. Elle a pu peu à peu reconstruire sa vie : "Ils m'ont donné tellement plus que de la nourriture et un abri. Ils m'ont donné de l'espoir" dit-elle avec un sourire.
Au cours des quinze derniers mois du partenariat de l'OIM avec cette association d'assistance aux victimes de la traite des êtres humains, les travailleurs sociaux ont identifié 39 victimes potentielles de la traite dont 17 ont bénéficié d'un hébergement d'urgence et 19 ont reçu des consultations médicales.
Après cette expérience, Alice a été désireuse de redonner quelque chose en retour. Le jour de la Journée internationale de la femme, elle a aidé l'association à organiser les activités de célébration de la Journée. Elle a préparé tout le buffet et a aidé de jeunes femmes migrantes à apprendre les bases de la cuisine et de la pâtisserie.
Aujourd'hui, Alice regarde vers l'avenir avec détermination. "Je veux retourner dans mon pays un jour et ouvrir ma propre pâtisserie. Ce sera ma façon de dire 'Je suis plus forte que mes épreuves'."

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Les activités dont a bénéficié Alice ont été mises en œuvre dans le cadre de l'initiative «Coopération en matière de migration et partenariats pour des solutions durables » (COMPASS), financée par le ministère des Affaires étrangères des Pays-Bas. COMPASS est une initiative mondiale, en partenariat avec 14 pays, conçue pour améliorer l'accès à des voies de protection sensibles et à l'autonomisation pour les migrants de tous genres et groupes de diversité, leur permettant de contribuer à des résultats de développement durable dans leurs communautés.

SDG 16 - PAIX, JUSTICE ET INSTITUTIONS EFFICACES
SDG 10 - INÉGALITÉS RÉDUITES
SDG 1 - PAS DE PAUVRETÉ